Le premier documentaire consacré aux Droits de la Nature retrace l’odyssée de leur progression à travers le monde au cours des dix dernières années. Projeté pour la première fois en mai 2018 au festival international du film documentaire de Munich, l’opus s’intéresse également à la mise en œuvre de ces droits via le témoignage d’une vingtaine d’experts et acteurs internationaux.
Parce que l’image constitue un formidable vecteur de sensibilisation, raconter au travers d’un film l’émergence des Droits de la Nature était un travail aussi nécessaire qu’attendu. C’est chose faite grâce au documentaire « The Rights of Nature: A Global Movement » co-produit par Issac Goeckeritz en mai 2018. En 53 minutes, au travers de témoignages d’experts, professeurs d’université, avocat, responsables d’ONG, ancien ministre, responsable de communauté autochtone et autres scientifiques, le film retrace l’avènement progressif des Droits de la Terre depuis leur consécration en 2008 dans la constitution d’Equateur. A la faveur d’images d’archives, on revit la ferveur des débats ayant animé l’assemblée constituante de l’époque et l’on mesure alors le saut philosophique qu’a constitué une telle reconnaissance pour le pays. Et pour le monde.
Avènement des Droits de la Nature à travers le monde
A partir du point de départ équatorien, Goeckeritz s’intéresse aux cas de quelques uns des cent pays qui reconnaissent à ce jour une forme de Droits de la Nature dans leur corpus juridique national. L’avènement des droits de la Terre en Nouvelle-Zélande est ainsi mis à l’honneur. On plonge dans le combat du peuple Maori ayant accouché de la reconnaissance de l’ancien parc national Te Urewera en tant que sujet de droits en 2014. Intelligemment illustré, le dialogue entre les Maoris et les autorités néo-zélandaises a également permis la reconnaissance de la rivière Whanganui en 2017.
Non content de mettre en lumière ces reconnaissances emblématiques, le film s’intéresse aussi à d’autres contextes davantage urbanisés, tels que la ville de Santa Monica aux Etats-Unis où les Droits de la Nature sont reconnus depuis 2013. Votée à l’unanimité sur fond de large soutien populaire, l’ordonnance municipale offre à tout résident de Santa Monica la possibilité de faire respecter les droits des écosystèmes locaux. Reste qu’en pratique, la mise en œuvre des droits demeure à ce jour limitée.
Regard sur la mise en œuvre des Droits de la Nature
L’enthousiasme suscité par la reconnaissance des Droits de la Nature se traduit-il localement par une meilleure protection de l’environnement ? C’est la question que pose également le documentaire et à laquelle il apporte un début de réponse. Tout en rappelant une victoire judiciaire localisée en Equateur, le film laisse entrevoir les difficultés de mise en œuvre qui limitent actuellement l’effectivité de ces droits. Il pointe ainsi des contradictions entre certaines politiques publiques d’extraction des ressources naturelles incompatibles avec les textes votés, le manque de volonté politique à appliquer les droits face à des mannes économiques tels que le tourisme, ou encore les freins financiers du recours individuel en justice.
Rome ne s’est pas faite en un jour. L’application effective des Droits de la Nature prendra, elle aussi, du temps souligne une partie de la vingtaine d’experts interrogés dans le film. Par delà le temps de maturation nécessaire à leur effectivité, ce que retient in fine le documentaire c’est le projet philosophique de rénovation de notre rapport au Vivant et de changement de société que sous-tendent et proposent les Droits de la Nature. Ce projet qu’Alberto Acosta, ancien président de l’assemblée constituante d’Equateur résume par ces mots : « Les Droits de la Nature sont une opportunité pour construire une autre civilisation qui dépassera définitivement une vision anthropocentrique, ne cherchant pas à mettre l’Homme au centre, dominant la Nature mais au sein de laquelle tous les êtres vivants, dont les humains, peuvent vivre dignement ».
Fraîchement lancé en mai 2018 à Munich, le film a vocation à être projeté lors de festivals, au sein d’universités et au profit d’associations. Une diffusion à la télévision et en streaming est envisagée en 2019. Pour toute demande de projection, contactez Issac Goeckeritz.
Nicolas Blain (@Nicolas_Blain sur Twitter)